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Le blog du chatborgne / blog de livres
2 novembre 2009

Outreau : un nouveau livre captivant, et dérangeant

Beaucoup de nos compatriotes, sans doute, se souviennent du visage de Mme Marie-Christine Gryson-Dejehansart, psychologue clinicienne et expert auprès de la cour d'appel de Douai, qui avait examiné les enfants du dossier dit "d'Outreau". Ecrire qu'elle fut vivement vilipendée à l'époque, c'est peut-être faire preuve d'une trop grande modération ; il suffit de se reporter à quelques compte-rendus du procès de Saint-Omer pour s'en rendre compte.

Aujourd'hui libérée du devoir de réserve, Marie-Christine Gryson-Dejehansart a décidé d'examiner ce que, dans le lexique médiatique actuel, on appelle une storytelling ; en clair : "la bonne histoire au bon moment", qu'elle soit vraie ou fausse d'ailleurs. Et la "bonne histoire" dans ce cas précis, c'était de dire, de raconter que les enfants d'Outreau ont, par manque d'affection, inventé des abus sexuels. Menteurs, forcément menteurs, pour paraphraser feu Marguerite Duras. La vérité est différente, et bien plus sordide.

Ce livre est digne d'intérêt. D'abord, parce qu'il est écrit par une psychologue, d'où une approche différente que celle d'un accusé, d'un avocat, ou d'un journaliste sur cette triste affaire. Ensuite, parce que l'auteur apporte un éclairage inédit sur un dossier pollué par le prêt-à-penser médiatique : il est difficile de ne pas être sidéré quand Marie-Christine Gryson-Dejehansart relate certains faits. Des exemples ? Le comportement de certains avocats de la défense à commencer par Me Eric Dupont-Moretti, la "terreur des prétoires" (p.72) qui manquèrent totalement de retenue avec les enfants lors du procès de 2004 ; président des assises de Saint-Omer, Jean-Claude Monier devait déclarer plus tard que certains furent interrogés avec "une certaine brutalité verbale" (p. 76). Le pilonnage auquel ils se sont livrés contre les experts psychologues cités à la barre, dont l'auteur et Jean-Luc Viaux, professeur de psychopathologie à l'Université de Rouen (p. 83-109). Une presse qui, après avoir trainé dans la fange les personnes mises en examen durant l'instruction, fit cause commune avec leurs défenseurs lors du procès. Résultat : elle nous livra des comptes-rendus passablement orientés, parlant de la déposition du juge Burgaud comme celle d'un "technicien froid et obstiné", alors que, selon le président Monier, "il s'était montré sensible" et "avait fait une forte impression sur les jurés" (p. 108). Et cette lame de fond médiatique ne cessa de se creuser jusqu'à l'aboutissement du procès en appel de Paris à l'automne 2005 (p. 163-173).

Bien sûr, on fera certainement observer que cet ouvrage est d'abord un plaidoyer, et que l'auteur n'y évoque guère certains éléments du dossier qui sont bel et bien partis en quenouille (les orgies à caractère zoophile dans une ferme de Belgique, notamment). C'est vrai. Mais il est vrai aussi que Marie-Christine Gryson-Dejehansart a le mérite de rappeler que, si seules quatre personnes ont été condamnées, douze enfants ont été reconnus victimes au terme des deux procès d'assises ; quoi qu'en dise l'abbé Wiel, blanchi par la cour d'appel de Paris en 2005, qui, s'exprimant (paraît-il) au nom de tous les acquittés, a accusé les deux aînés du couple Delay/ Badaoui d'avoir tout inventé (p. 15-16 et p. 218-220). Et ces pauvres gamins n'ont même pas été auditionnés par la commission d'enquête parlementaire du premier semestre 2006, même à huit clos (p. 177-178). Un défaut de curiosité bien regrettable ! En outre, en s'appuyant sur les compte-rendus de l'enquête de l'Inspection générale des services judiciaires (p. 200-207) et les auditions lors de la comparution de Fabrice Burgaud devant le Conseil Supérieur de la Magistrature (p. 238-251), l'auteur démontre que, en clouant au pilori les assistantes maternelles, policiers, travailleurs sociaux, psychologues et magistrats qui ont travaillé sur cette affaire, la justice médiatique est allée un peu vite en besogne.

Outreau la vérité abusée propose un son de cloche différent de celui que l'on entend généralement sur ce dossier de pédocriminalité, et, ne serait-ce que pour cette raison, il en dérangera plus d'un. A découvrir d'urgence.

Frédéric Valandré.

Blog du livre.

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Commentaires
C
very interesting, greats for you.
C
ALERTE / Aide Sociale à l'Enfance - Pas de Calais -<br /> <br /> LE VER EST DANS LE FRUIT :<br /> <br /> « La justice française, en tout cas, veut tirer les leçons d’Outreau. «Une procédure plus contradictoire et une meilleure implication des avocats» contrebalanceraient la toute-puissance des experts dans l’interprétation de la parole des enfants, indique le juge pour enfants au tribunal de Bobigny, Alain Vogelweith.» Source:http://www.rfi.fr/actufr/articles/071/article_39903.asp<br /> <br /> C’est quoi ce gugus qui comme par hasard trempait dans le même tribunal que l’illustre Jean-Pierre Rosenzweig du Coral et qui se permet lorsque ça l’arrange de mettre en doute la parole d’experts.<br /> <br /> Le Collectif Nord va lui mettre par la gueule l’expertise de Daniel Legrand fils effectuée par Michel Emirzé et ensuite l’on verra s’il remet toujours en doute la parole des enfants…<br /> <br /> D’autant plus troublant que ‘le monsieur’ a trouvé planquette près le P.S. du Nord : (Publié le 02/09/2009 )<br /> <br /> « Alain Vogelweith est, depuis hier, le nouveau directeur général des services du conseil général du Pas-de-Calais. » C’est Vallini qui la pistoné ce Vogelweith ? Comme disait le grand con : ‘Au P.S. aussi ils commencent à me les briser menu’.
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