Le Bachelier, Jules Vallès
LE BACHELIER
Jules Vallès, fondateur du journal « Le Cri du Peuple » et communard acharné a commis une trilogie autobiographique un temps appréciée dans les collèges et les lycées. On doit désormais en distribuer quelques morceaux choisis particulièrement picorés dans « Le Bachelier », le deuxième opus.
L’étudiant d’aujourd’hui pourra d’ailleurs facilement s’identifier à Jacques Vingtras (Jules Vallès), le fort en thème ou qui se croit tel, monté de son Auvergne à Paris et qui dédicace son ouvrage « à ceux qui, nourris de grec et de latin, sont morts de faim ». Ce Jacques Vingtras là c’est un peu notre Richard Durn, ce sont les étudiants bac + 5 sur des voies de garage qui ont appris avec de mauvais maîtres que la société devait leur dérouler le tapis rouge. Des petits boulots alimentaires jugés indignes d’eux vont nourrir leur frustration sociale pour en faire de véritables bombes.
Jacques Vingtras arrive donc à Paris pour chercher d’autres républicains (les communistes de l'époque), et espère vivre de l’argent que lui envoient ses parents. Il aime l’émeute et cherche à l’organiser dans les universités sans pour autant être étudiant. Il est un peu antisémite quand il s’en prend au bourgeois, à l’intéressé, à l’avare, au juif. C’est aussi contre le bourgeois en lui qu’il s’insurge, contre cette sensiblerie qu’il veut tuer pour ressembler à ces Spartiates dignes de l’admiration de Robespierre.
Mais la société bourgeoise semble se venger en le forçant à gagner de quoi vivre, il prend cela comme une mesquinerie et cherche des subterfuges : « il a été formé une caisse avec les sous que chacun pouvait avoir, et nous vivons là-dessus – jusqu’au grand moment où, si l’on a soif et faim, on réquisitionnera au nom de la République dans le quartier en feu. ». Et voilà notre Vingtras Vallès répétiteur chez des escrocs et finalement pion dans un collège, il enrage : « un soir de douleur et de colère, je suis homme à arrêter dans la rue un soldat ou un mouchard que je ferai saigner, pour pouvoir cracher mon mépris au nez de la société en pleine cour d’assises… Mais tu nous le paieras, société bête ! qui affame les instruits et les courageux quand ils ne valent pas être tes laquais ! Va ! Tu ne perdras rien pour attendre ! »
Vingtras est donc une petite ordure pathétique, un monstre frustré qui combat des fragments d’humanité en lui. Il prend pour idéologie ses pulsions anomiques ou suicidaires, Vingtras est notre contemporain.
Xavier COLLET
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